L’observatoire interpelle le gouvernement et les députés sur quatre mesures du projet de loi « sécurisation de l’emploi », qui peuvent mettre en danger la vie professionnelle et familiale de milliers de salariés.
il s’agit
- de l’absence de fixation de limites à la mobilité géographique et professionnelle, dont les effets destructeurs (plusieurs dizaines de suicides) ont conduit à la mise en examen du PDG de France Télécom, alors même que l’entreprise avait négocié cette liberté avec ses syndicats ( art L2242-22 al2°).
- de la création d’une « mobilité volontaire » qui est en réalité une incitation au harcèlement et à l’exclusion de la population des seniors (art L1222)
- de la possibilité de négocier l’imprévisibilité du planning des travailleurs à temps partiel (L 2241-13), non compensée par les autres mesures de l’accord, et qui détruit l’équilibre de vie des plus précaires des travailleurs, des femmes pour la plupart
- Enfin de la substitution d’une instance négociée par l’entreprise aux missions de prévention des CE et CHSCT (L4616 -5) et de la réduction des délais d’expertise en cas d’enquête à … 9 jours dans 90 % des cas !(L1233-35), avec liberté de négocier des accords… encore plus défavorables (L1233_30 8°).
Ces mesures ont été ou sont déjà mises en oeuvre dans nombre d’entreprises, petites ou grandes, et c’est à la lumière du fonctionnement réel des entreprises et du dialogue social que l’observatoire a envoyé aux parlementaires un courrier d’alerte et un dossier d’analyse.
La gestion discriminatoire des congés payés dans le secteur immobilier
Suite à la suppression du jour de carence dans la fonction publique,
Le Dr Brigitte Font le Bret lance un appel à la Ministre de la santé publique pour suspendre le traitement discriminatoire dont font l’objet les fonctionnaires placés en congé maladie par leur administration :
En effet, les experts agréés par l’adminsitration pour juger de la validité de la maladie des patients ne sont ni formés ni contrôlés à l’instar de leurs homologues de la Sécurité sociale, ce qui entraine des dérives dans le traitement des dossiers.
Quand rhétorique managériale rime avec violence sociale
Notre article analyse le contexte stratégique, organisationnel et managérial de la crise sociale qu’a traversée une grande entreprise de télécommunication en France à l’automne 2009, alors qu’une vague de suicides de salariés survenus entre 2008 et 2009 connaissait une forte médiatisation. Nous resituons, en premier lieu, ces suicides par rapport aux transformations majeures qu’a récemment vécues cette ancienne administration, en montrant qu’elles s’inscrivent dans la profonde mutation que connaît le capitalisme français. Nous analysons ensuite la manière dont ces mutations se sont incarnées dans une rhétorique managériale, porteuse de violence pour le corps social de l’entreprise.
Début 2012, l’ARCEP annonçait la suppression de 10.000 emplois dans la filière Télécom. Quelques mois plus tard un universitaire publiait une étude qui prédisait à la disparition de 50.000 emplois dans ce secteur d’activité dans les deux années à venir.
Tandis que les opérateurs Bouygues et SFR ont annoncé récemment des plans de départs volontaires et la suppression de milliers d’emplois, Stéphane Richard a présenté de son côté le jeudi 8 octobre, la nouvelle “ politique pour le (dés)emploi ” du groupe ORANGE pour la période 2012-2015.
En résumé, l’entreprise annonce la suppression de 5.000 emplois pour les trois ans à venir, notamment :
- En supprimant 150 agences – et plus de 3000 emplois – dans ses activités commerciales
- En délocalisant à l’étranger, dans les filiales, tout le budget de la Recherche et Développement du groupe.
La cour de cassation vient de confirmer la condamnation pour faute inexcusable d’un employeur qui, au nom de la rentabilité, avait réduit ses effectifs et fait porter la charge de travail résultante sur le personnel restant (un cadre en l’occurence), sans considération des capacités du travailleur ni de son état de santé (1).
Il s’agissait d’un cadre, victime d’un accident cardiaque suite à la politique de réduction des effectifs et de productivité de son entreprise : il travaillait 70 heures par semaines et remplaçait plusieurs salariés. Le jugement reconnait l’infarctus du salarié comme accident de travail, considère la surcharge de travail comme origine de cet accident et condamne de ce fait l’employeur pour faute inexcusable.
On lira avec profit ci après les attendus du jugement initial, qui nous rappellent que le travail est l’objet d’un contrat, écrit ou tacite, entre deux parties : l’employeur (administration ou privé) ne peut décider unilatéralement des conditions de travail sans se préoccuper des conséquences pour le travailleur, et ses décisions sont contraintes par une obligation de résultat en matière de santé et sécurité du personnel.
Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable.
Nous citons in extenso les principaux attendus du jugement de la cour d’appel ainsi confirmé (2)
Considérant qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié l’employeur est tenu envers celui ci d’une obligation de sécurité de résultat notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation de sécurité a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L 452-1 du code de la Sécurité Sociale lorsque l’employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver (3)
Considérant que s’il appartient à l’employeur, dans le cadre de sa mission de bonne gérance de l’entreprise, de veiller à la maîtrise () des coûts, en procédant aux ajustements nécessaires tant sur le plan matériel qu’au niveau du personnel, il lui importe tout autant de controler la mise en application de ces dispositions en tenant compte du respect dû aux personnes concernées…
.Considérant qu’un employeur ne peut ignorer ou s’affranchir des données médicales afférentes au stress au travail et ses conséquences parfois dramatiques pour les salariés qui en sont victimes,…
Considérant que (l’objectif de rentabilité) … n’entraine pas pour les autres salariés une charge qui, de ce fait leur serait transférée, avec pour corollaire d’assumer seuls les conséquences de cette économie, (et) ce au delà de leurs propres capacités de travail,
Et (considérant) que d’autre part, (cet objectif doit) s’accompagner d’une politique visant à accompagner et respecter ces mêmes salariés à qui un effort accru était demandé;
Considérant que … le silence du salarié, tributaire de son emploi, ne vaut pas approbation,
Considérant que (la) politique de surcharge, de pression, (et) d’objectifs inatteignables est confirmée (par les attestations du salarié victime de cette surcharge) (3)
.Considérant que (l’entreprise) n’a pas utilement pris la mesure des conséquences de ses objectifs de réduction des coûts en terme de facteurs de risque pour la santé de ses employés,Considérant en conséquence que la faute inexcusable est retenue.
(1) Cass. 2° civ., 8 novembre 2012, n° 11-23.855 F – D (2) Cour d'appel de Paris CA Paris Pole 6, ch 12, 30 juin 2011, n° 10/05831 (3) Il appartient au salarié de prouver que l'employeur n'a pas pris les mesures nécessaires pour le préserver du danger dont le dit employeur devait avoir conscience.